Il y a des jours où l’on souhaiterait ne pas avoir à toucher à notre clavier. Ce vendredi 3 juin 2016 devait être une journée blanche (d’article) pour moi, elle est devenue noire.
Comme vous l’avez appris cet après-midi, Luis Salom est décédé des suites d’une chute lors des essais libres n°2 du Grand Prix de Catalogne. L’accident s’est produit au virage n°12, à priori dans la section du Banc de Sabadell qui suit le fameux grand virage rouge. Grièvement touché, il a été transporté à l’hôpital sans pouvoir être réanimé.
« Quand ce genre de chose arrive, tout le reste compte pour zéro » disait Valentino Rossi après la mort de Shoya Tomizawa à Misano en 2010. D’autres pilotes ont ensuite connu un destin similaire à celui du japonais : Marco Simoncelli en MotoGP, Andrea Antonelli en Supersport […] et désormais Luis Salom, parti au guidon de sa Kalex. Et en effet, tout me semble être de l’ordre de zéro depuis quelques heures.
Le sport moto nous fait vibrer. Pour lui nous parcourons des milliers de kilomètres, dépensons sans compter et travaillons d’arrache-pied afin de se rapprocher à quelques mètres de nos idoles le temps d’un week-end. Le sport moto nous fait rêver, jusqu’à nous faire vivre au rythme de l’actualité des paddocks. Mais comme tout plaisir, il a aussi ses vices et il arrive parfois qu’il nous fasse pleurer. Ce soir, toute la communauté motarde pleure la mort de l’un de ses héros.
Un tel drame nous rappelle à quel point cette discipline est dangereuse, et combien les querelles entre pilotes, supporters […] sont parfois dérisoires. Ces pilotes, qui connaissent parfaitement les risques et en font régulièrement les frais, sont avant-tout des humains à qui nous devons le respect pour le simple courage qui est le leur lorsqu’ils enfourchent leurs machines. Car, et les événements du jour en témoignent malheureusement, en quittant la voie des stands ils ne sont jamais totalement sûrs d’y revenir.
Une carrière mouvementée
Luis Salom faisait partie du paysage des paddocks que nous chérissons tant depuis 2009. Après deux saisons et demie en 125cc, où il est monté sur 2 podiums, le natif de Palma de Majorque a été l’un des grands animateurs de la catégorie Moto3. Sa première victoire, acquise en 2012 à Indianapolis, restera dans les annales (photo ci-contre où il est en blanc) : il triomphait alors de l’allemand Sandro Cortese (+0.056), tandis que Maverick Vinales chutait en tentant le tout pour le tout dans les derniers mètres.
Vice-champion du monde, il brigue l’année suivante le titre dans une lutte qui tiendra le public en haleine jusqu’à la dernière épreuve valencienne. Leader à la veille de l’ultime GP, Salom réalise une saison spectaculaire mais manque le sacre pour une poignée de points à cause d’une chute. Doté du plus grand nombre de succès dans la saison (7), il figure comme le grand perdant de 2013 mais signe néanmoins en Moto2 avec Pons HP40.
Véloce, l’espagnol s’illustre dès son arrivée en montant sur le podium lors de son 3ème GP en Argentine. Quelques semaines plus tard, au Mugello, il échoue à 248 millièmes de la victoire derrière son compatriote Esteve Rabat. Moins régulier par la suite, Salom retrouvera difficilement le chemin des avants-postes (13ème en 2015 avec 80 points).
L’Homme sous le casque
Tout avait bien commencé en 2016 : engagé par le SAG Team, il s’offre d’entrée de jeu une superbe 2ème place au Qatar. Un podium dédié à sa mère, omniprésente à ses côtés et véritable pierre dans l’édifice de sa carrière. Le trophée de Losail restera à jamais comme son dernier.
Luis Salom n’étant pas homme à courir après lumière médiatique. Il préférait celle de la piste, mais aussi du Dieu auquel il se vouait, comme nous le racontait Michel Turco en juillet 2013 dans le n°5 du magazine GP Racing. Il avait réalisé un article au sujet de « cet attachant garçon », article rendu disponible sur sa page Facebook et que nous vous invitons à lire ici.
De ses premières expériences motorisées à ses exploits internationaux, en passant par ses titres de Champion des Baléares de Supermotard et ses prestations en Red Bull MotoGP Rookies Cup, Luis Salom a dédié son existence à son sport. Aussi humble que respectueux, aussi travailleur que talentueux, il devait célébrer ses 25 ans le 7 août prochain.
Cet anniversaire se fêtera ailleurs, dans un autre monde où Saarinen, Rougerie, Kato et autres Simoncelli l’attendent pour de nouvelles arsouilles. The show must go on. Au revoir « El Mexicano », et merci pour ces courses, ce spectacle, ces émotions, cette passion. Merci pour tout.