«Désolé, mais ton gars n’a pas le profil»: paroles du patron d’un team MotoGP dont le nom est connu de la rédaction. Profil, c’est le nouveau mot à la mode dans le paddock, comme c’est la règle dans le business de tous les jours. Combien sont ceux qui sont revenus d’un entretien d’embauche et qui ont entendu: «Votre dossier est excellent, vos références parfaites, malheureusement, vous n’avez pas le profil de la personne recherchée!»
Désormais, c’est ainsi que l’on se défait des questions gênantes, quand on demande à un team-manager pourquoi il ne donnerait pas une chance à celui-ci, plutôt qu’à celui-là. Le problème, c’est lorsque l’on poursuit la discussion et que l’on aimerait avoir quelques précisions sur le fameux profil exigé. Là, les explications deviennent beaucoup plus brumeuses: «Trop vieux à 30 ans!» Valentino Rossi devrait donc être à la retraite depuis longtemps, alors qu’il n’a jamais été aussi fort. Et moi, triste plumitif de 57 printemps, je devrais rester calmement sur une chaise longue, à l’ombre – ou à l’abri des pluies – d’un arbre, dans le verger d’un hospice pour personnes séniles. On n’aime donc pas les années qui passent: «Mais attention, on manque d’expérience à 18», précisent les profilers.
Ensuite, soit on n’a pas un palmarès digne d’être considéré, soit ledit palmarès – un titre mondial, onze victoires en GP, pour prendre un exemple totalement au hasard – est certes intéressant, mais il s’étale sur une trop longue période.
Enfin, il y a le marché que l’on représente. Ou que l’on ne représente pas. On vient d’un pays où la télévision publique nationale retransmet tous les GP en direct – autre exemple pris au hasard – et où les grands quotidiens généralistes consacrent chaque week-end de GP des pages à l’événement, on nous répond que le marché dudit pays est trop exigu. Mais si vous êtes le représentant d’une des grandes nations européennes, on va vous rappeler que mis à part la presse dite spécialisée – tirage et lectorat limité – et la télévision payante – idem -, personne ne sait que le «produit MotoGP» existe.
Lorsque, très modestement, j’essayais de garder les quatre roues d’une Simca Rallye 2, puis d’une Opel Kadett et enfin d’une Porsche 911 sur les routes du Rallye Monte-Carlo, il m’arrivait souvent de parler de profil. C’était quand la route devenait plus glissante, plus piégeuse, plus incertaine. Et je me demande si ce n’est pas la même chose dans l’affaire qui nous intéresse. Si on n’évoque pas le profil, quand on ne sait plus que faire. Car à force de se focaliser autour du pilote idéal – tout le monde ne peut pas avoir 16 ans, le talent de Marc Marquez, le charisme de Valentino Rossi, un passeport indonésien – quel marché, mes enfants! – et des parents richissimes pour payer les faux-frais -, les décideurs oublient de regarder la réalité en face. Dommage, car la composition du peloton de la catégorie reine pourrait être plus hétéroclite. Et pas nécessairement de moindre qualité. Tiens, vous avez vu la photo ci-dessus: c’est un pilote qui n’a pas le profil et qui a roulé, ces deux derniers jours, à Mugello avec la KTM MotoGP!
Allez, on se voit à Assen. C’est un pays plat, sans profil géographique. Cela ne l’empêche pas d’être considéré comme la cathédrale de la course!
Stay tuned!
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