Escapade à Tavullia, sur les traces de Valentino



Une banderole sur les remparts de Tavullia

C’est dans son village d’origine, loin du bruit des circuits, que Rossi a passé ses fêtes de Noël. Profitant de l’absence de neige, malgré la saison, nous avons rejoint Tavullia en voiture, pénétrant dans les campagnes à la frontière entre les Marches et l’Émilie-Romagne. Ignorant que – outre une journée douce et ensoleillée – ces lieux nous réservaient d’autres surprises…

12hLes chemins sinueux qui sillonnent le paysage autour de Tavullia semblent faits pour les amants des deux roues. Un groupe de cyclistes, justement, nous empêche d’avancer aussi vite qu’on le voudrait en direction de la ville d’origine du Vale national. Heureusement, la vue qui s’offre à nous adoucit l’attente: au loin, la mer; ensuite, de longues chaînes de collines qui, vues de haut, semblent glisser les unes sur les autres comme des vagues; et tout près de nous, une vieille Cinquecento blanche garée devant une maison de campagne. Elle fait aussi partie du paysage.

12h30Nous arrivons à Tavullia. À première vue, elle n’est pas si différente de beaucoup d’autres villages de cette région : petite, perchée sur une colline, modeste et presque déserte. Sauf qu’ici, le 46 est omniprésent. De l’énorme banderole accrochée aux remparts, aux drapeaux qui flottent sur les toits et sur les balcons; de la façade de l’Hôtel de Ville aux noms des bars, tout ici rappelle le nonuple champion du monde. Qui, en effet, « devrait être dans le coin », nous répond une employée du Fan Club de Valentino Rossi, évasive devant l’inévitable question. « Il a passé le Noël ici, mais on le voit rarement en ville, pendant la journée. Il vit la nuit! » sourit-elle, nous confirmant que s’il ne vivait pas en cachette, les gens ne le laisseraient pas tranquille.

Il y a néanmoins une personne, à Tavullia, qui a rencontré Valentino très récemment – juste avant Noël – et qui pourrait nous accorder quelques minutes de conversation. Il s’agit d’un vieux curé, Don Cesare, qui connaît Rossi depuis qu’il était tout petit, encore aux prises avec des solutions improvisées pour exprimer sa passion pour la vitesse. Pour son 90ème anniversaire, la semaine dernière, Don Cesare a eu ainsi la visite surprise – ou pas! – de son pilote préféré. Nous l’avons rencontré dans sa paroisse : c’est drôle que ce soit l’église de San Lorenzo…

14h – Sous son air austère, Don Cesare cache une propension à sourire et à raconter. Nous sommes dans son bureau et il est solidement assis devant nous – le regard un peu méfiant et sceptique, au départ. En réalité, notre question est simple : comment ça se fait qu’un personnage d’envergure internationale, une vraie star telle que Valentino Rossi, ait gardé contact avec sa ville d’origine d’une façon si intime, si familière? Les photos accrochées aux murs sont là pour témoigner de l’amitié entre une idole mondiale et un beaucoup moins connu curé de Tavullia. Improbable, mais vrai. Don Cesare hésite, mais trouve enfin ses mots : « Depuis que les habitants de Tavullia ont découvert ce jeune talent qu’était Valentino, ils se sont serrés autour de lui, comme s’ils voulaient le protéger ». Voilà qui explique la réticence de ses concitoyens à parler de lui. Rossi peut compter, ici, sur un maximum de respect pour sa vie privée. Les curieux et les touristes, eux, ne sont pas spécialement bien vus. « Les gens ne le laissent pas en paix. Surtout en été, lorsqu’ils passent leurs vacances sur la côte adriatique, les touristes font un détour par Tavullia. Ils posent des tas des questions… ».

Et quid des débuts de son amitié avec Valentino? « Je le connais depuis qu’il était petit » dit-il. « Il est né à Urbino, mais sa famille a emménagé à Tavullia peu après. Il passait beaucoup de temps ici : souvent, il roulait à vélo devant l’église. C’était un petit peste, un fou…le cauchemar des Carabinieri! Non mais, sérieusement, il dégageait une énergie incroyable« . Et il n’a pas changé depuis. « À chaque fois que je le vois, il se montre toujours souriant et positif. Et il y a encore quelques jours, lorsqu’il est venu me voir – bien sûr incognito – pour mon anniversaire, j’ai eu la même impression. Malgré la mauvaise année qu’il a vécue, il reste persévérant. Je lui fais confiance ». Ce rapport étroit qu’il entretient avec Tavullia n’est pas venu tout seul, mais c’était le fruit d’un choix encouragé par ses amis de longue date : « ils craignaient que le succès lui monte à la tête et que cela lui fasse oublier ses racines », raconte ce fan d’exception.

Mais ce succès fulgurant a été d’abord un motif de joie et de fierté : « À chaque victoire de Valentino, je fais sonner les cloches!« . Sa voix s’anime, ses yeux brillent. « Quand il était petit, on voyait bien que c’était un gamin pas comme les autres. Il avait la moto dans le sang. Il avait l’étoffe d’un champion ». Don Cesare ne l’a jamais perdu de vue. « Je ne rate jamais un seul GP, et j’ai été le voir une fois au Sachsenring et deux fois au Mugello. Ce fut folklorique! J’avais même apporté le nécessaire pour célébrer la messe à l’hôtel… Je me rappelle qu’au Mugello, après la course, j’étais rentré dans le paddock pour voir Valentino. Les gens me regardaient avec suspicion et quelqu’un m’a demandé qui j’étais. « Padre Cesare », j’ai répondu, et ils ont cru que je me prenais pour le père de Valentino… ». Anecdote à part, Cesare nous indique ces photos que nous avions déjà remarquées, et qui ont été prises au Mugello, justement. Elles montrent un curieux duo rayonnant de bonheur…

On ne le voit pas, mais Valentino est toujours là, à Tavullia, et il y a à peine quelques jours, il était dans ces salles où nous nous trouvons maintenant. C’est ici, dans sa terre d’origine, que sa pensée est allée, une fois de plus, à son ami Marco Simoncelli : « Je voudrais Marco comme cadeau de Noël », a-t-il dit sur Twitter. Et c’est à Coriano, ville d’origine de Simoncelli, que notre escapade s’achève.

16h00En passant par Montelupo, où Rossi va bientôt inaugurer un nouveau circuit de speedway, qu’il a déjà testé avec son ami Tony Cairoli, nous poursuivons en direction de Coriano, qui se trouve à 15 km de Tavullia. Il s’agit, une fois de plus, d’une petite ville normale et paisible. Sauf que le destin de Sic l’a transformée. L’ambiance est triste, mais la chaleur des gens et le soutien des fans sont palpables. L’espace où sera érigé le mémorial de Marco est rempli de fleurs et de messages. Il s’agit d’une petite place en amphithéâtre, s’ouvrant aux pieds d’un escalier qui mène à une église. Le tout est surplombé par une grande affiche dédiée au Sic : « Ciao Sic, Coriano est avec toi« , on y lit. De temps en temps, des gens s’arrêtent quelques minutes, puis repartent. Dans le silence d’un après-midi comme les autres, le seul bruit qu’on entend est celui d’un ballon qui rebondit au milieu de la place, où des gamins jouent au calcio.  Il n’y a pas de mots, juste beaucoup d’émotion.

Voici le récit – en images – de cette journée….

Stay tuned!

 

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