
Losail, Austin, Le Mans : Enea Bastianini a décroché en France sa troisième victoire en MotoGP, en l’espace de sept courses disputées en 2022. Et pour gagner au circuit Bugatti, le champion du monde Moto2 2020 a appliqué exactement le même schéma de course que celui qui l’avait porté sur la plus haute marche du podium au Qatar puis aux États-Unis.
Enea Bastianini n’est pas du genre à tenter de prendre la poudre d’escampette dès les premiers mètres, comme le faisait par exemple Jorge Lorenzo. Ni à attendre les derniers pour placer son attaque décisive, comme le faisait par exemple Valentino Rossi. Sa stratégie est différente, et elle est fatalement efficace ces dernières semaines. La voici résumée en trois points en s’appuyant sur la course du Mans. Mais la même chose, avec des noms et des tours différents, peut être répétée pour Losail et Austin.
Parir devant. Dans une catégorie MotoGP plus serrée que jamais, et où les dépassements se font difficiles, une course est (presque) impossible à gagner si on se retrouve neuvième ou dixième après quelques virages. « Tu rates ton départ, c’est terminé », a souligné Fabio Quartararo dimanche dernier. Le Français en a fait les frais au Mans : il s’est retrouvé huitième, a tenté de remonter mais il lui a été impossible de dépasser. Il avait pourtant un rythme équivalent – et parfois même plus rapide – à celui des leaders. Mais le temps perdu au début ne se rattrape plus.
La victoire d’Enea Bastianini s’est donc construite à partir du samedi, quand il a accroché la cinquième place en qualification. À cela s’est ajouté un départ réussi, puisqu’il s’est rapidement hissé au troisième rang, au contact de Francesco Bagnaia et Jack Miller. Idéal pour lancer son opération échec et mat.
Suivre le train. Pourquoi imprimer le rythme et dévoiler ses cartes, quand on peut suivre ses adversaires, s’économiser – en énergie et en pneu– et observer les points forts et points faibles de ses rivaux ? Le pilote Gresini a ainsi passé la première partie du Grand Prix derrière les deux Ducati officielles, attendant son heure.
« Miller et Bagnaia étaient rapides, mais mon rythme était similaire. En première partie de course je suis resté calme pour voir où je pourrais attaquer Jack », a-t-il raconté. Ce fut chose faite au 12e tour, moment choisi pour porter l’estocade.
L’effort. Une fois Jack Miller doublé, Enea Bastianini a haussé le ton. De 1’32.3/5, il s’est mis à descendre en 1’32.2, puis 1’32.1, 1’32.0 et même 1’31.9 aux tours 19 et 20. Le suivant est celui où il s’attaque à Francesco Bagnaia, après avoir appliqué la même stratégie que face à Jack Miller. Et avoir utilisé son adversaire : « J’ai beaucoup appris de lui sur comment changer quelques trajectoires. » « J’ai gagné avec ma tête, car j’ai attendu le bon moment pour attaquer Bagnaia et le rendre nerveux. Je suis content d’avoir réussi », a-t-il encore ajouté.
Une fois devant, l’Italien avait encore quelques boucles à tenir. Le dernier effort à fournir, pour se mettre à l’abri de toute attaque de Jack Miller – Francesco Bagnaia étant tombé – et gérer les derniers tours. Un 1’31.9, puis deux 1’32.1, lui permettent de s’en aller. Il peut alors se relâcher (1’32.2 puis 1’33.1) pour franchir l’arrivée en vainqueur. Implacable.