Pilote professionnel dans les années 90, Jean-Marc Delétang organise désormais sa carrière de chef d’entreprise multi-casquettes comme il négociait ses virages, en prenant la meilleure trajectoire pour aller le plus vite possible. Ce goût de la performance lui permet d’aller loin dans ses projets, tout en ne ratant rien de ce qu’il se passe au plus haut niveau de la compétition moto. Il en a parlé à GP-Inside.
GP Inside : Que fais-tu depuis la fin de ta carrière sportive ?
Jean-Marc Delétang : « J’ai mis un terme à ma carrière de pilote il y a vingt ans, et depuis, je n’ai pas arrêté de travailler ! J’ai commencé par m’occuper de mes magasins de motos à Blois et à Tours, où je vends les marques Yamaha, Kawasaki et Honda, et j’ai aussi une boutique d’accessoires, donc j’étais déjà bien occupé. En 2015, pour mes 50 ans, j’ai décidé de retourner à l’école pour avoir une formation plus pointue. J’ai fait deux ans à la Montpellier Business School pour mieux comprendre le fonctionnement des marchés, du commerce… C’était vraiment très enrichissant de prendre du recul et d’avoir une vision différente avec de la comptabilité, de la finance, du management, du digital, bref, c’était un vrai challenge où il fallait savoir se remettre en question. J’ai beaucoup travaillé et de cette expérience est né ‘Envie2rouler’. »
« Après une étude de marché, j’ai identifié un réel besoin d’offrir un service nouveau avec la possibilité de louer une moto, partout en France puisqu’aujourd’hui, nous avons une centaine d’agences disséminées sur le territoire. Je suis très fier de cette société que j’ai créée, où il a fallu tout bâtir de A à Z et qui, au bout de cinq ans, atteint une bonne vitesse de croisière. Aujourd’hui, mon fils, Evi, m’a rejoint pour m’épauler dans cette belle aventure et, par exemple, nous sommes en train de finaliser un accord avec Air Corsica qui permettra de louer une moto en prenant un billet d’avion. Nous avons bien développé la Corse car c’est évidemment une destination de vacances où les locations fonctionnent bien. »
« En parallèle, j’ai été contacté par la Fédération française de moto en 2015 pour me proposer d’être directeur de course. Là encore, formation, examens et me voilà avec cette nouvelle fonction sur les épreuves françaises et internationales, dans un rôle passionnant, mais avec des responsabilités importantes où l’erreur est interdite ! Bien sûr, mon expérience de pilote m’aide à anticiper certaines situations, comme j’ai pu le faire récemment aux 24h du Mans. Mais encore une fois, il a fallu bosser, apprendre, décider, trancher et se faire respecter ! Et comme si ça ne suffisait pas, j’en ai aussi profité pour réaliser mon rêve de gosse et j’ai passé mon permis d’hélicoptère en 2016. Mais ça, c’est pour m’amuser ! »
Comment expliques-tu cette boulimie de travail ?
JMD. : « J’ai toujours aimé bosser et pour atteindre ses objectifs, je ne connais pas d’autres méthodes. Quand j’étais pilote, je n’avais pas d’argent mais je voulais y arriver et c’est sûrement ma motivation qui a fait la différence, je n’avais pas d’autre choix que de réussir. J’ai eu la chance de rencontrer Jean-Claude Olivier (ancien patron de Yamaha France, NDLR) et il a probablement joué le rôle du père que je n’ai pas eu. J’ai roulé et j’ai gagné pour lui et il m’a aidé à ouvrir ma première concession à Blois. »
« J’ai toujours voulu donner du sens à ma vie et j’aime entreprendre, construire, en restant dans le milieu de la moto qui est et sera toujours ma passion. Je m’entends bien avec le nouveau président de la Fédération, Sébastien Poirier, et il y a encore tant de choses à faire pour développer cette discipline en France ! Je reconnais qu’il y a peu d’oisiveté dans mon planning mais je prends tellement de plaisir avec toutes mes activités que je ne vois pas le temps passer. J’ai la chance aussi d’être bien entouré et j’ai appris à déléguer à quelques personnes de confiance qui sont à mes côtés depuis vingt ans, c’est indispensable. »
Qu’as-tu pensé du dernier Grand Prix à Portimao ?
J-M.D : « Je ne rate jamais une course et là, c’était du pur bonheur ! Je suis bluffé par ces pilotes qui attaquent en permanence, le niveau est incroyable, même le dernier est un extra-terrestre ! Evidemment, j’ai admiré la maîtrise de Fabio Quartararo, sa capacité à aligner les tours avec une précision millimétrée. Et il suffit de regarder où sont les autres pilotes Yamaha, loin derrière, pour comprendre que c’est bien lui qui fait la différence, grâce à un talent hors du commun. La bonne nouvelle, c’est que Fabio a amélioré son temps de course par rapport à l’an passé, ce qui n’était pas le cas au Qatar. À Portimao, il a roulé neuf secondes plus vite que l’an passé, donc lui et sa moto ont progressé, c’est indéniable et surtout rassurant pour la suite. »
« Il a vraiment une capacité fantastique d’exploiter sa moto, d’optimiser ses avantages et de minimiser ses inconvénients et ça, c’est la marque des grands champions : savoir tirer le meilleur de son matériel. C’est une grande chance pour la moto française d’avoir un pilote comme Fabio, il est sympa, bien élevé et si performant. C’est le genre de pilote avec qui tu as envie d’être copain et qui constitue un bel exemple pour nos jeunes. »
« Et c’est pareil avec Johann Zarco qui a également fait une course magnifique. Lui aussi est un diamant qui montre une formidable combativité. Je suis persuadé qu’il va gagner une course cette année et que cette victoire va le libérer, d’autant que je sais que Jean-Michel Bayle peut beaucoup lui apporter sur son approche de la course, sa gestion des situations en fonction des circonstances. Quel bonheur d’avoir deux si bons pilotes pour faire briller nos couleurs, on attend ça depuis si longtemps qu’on ne va pas bouder notre plaisir! »
Jean-Marc Delétang organise aussi des journées de roulage encadrées par Mike Di Meglio et Freddy Foray (voir en cliquant ici)