
Victime d’une erreur humaine à Motegi (lire ici), Aleix Espargaro a dû changer de moto et partir depuis les stands, avant de terminer 16ème. « Abattu » à l’arrivée, il pestait d’avoir perdu une chance de victoire, affirmant : « Je pouvais gagner très tranquillement avec le pneu medium. » La rédaction a analysé contexte, données et paramètres de la course pour livrer une réponse. La voici. ✪ Contenu Premium. GP-Inside n’existerait pas sans ses abonnés ! Version 100 % sans pub, intégralité du contenu… Soutenez notre travail, rejoignez les membres Premium !).
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Le calcul simple… mais erroné
À la lecture de ces lignes, le premier réflexe est de regarder les chronos de la course. Seizième, Aleix Espargaro termine à 25,473 secondes du vainqueur, Jack Miller. Il termine son premier tour, lancé des stands, en 2’00.351, quand l’Australien est en 1’53.033. Si on retranche cette différence de 7,318 secondes sur le temps final, l’Espagnol se retrouve à 18,155 secondes de la première place, donc à la 13ème place. Cette manière de procéder n’est toutefois pas suffisante pour obtenir de justes réponses.
Des secondes lâchées dans la remontée
En arrivant sur la grille, les pilotes viennent d’effectuer un tour qui a fait monter la température des pneus, et savent exactement avec quelle moto ils partent. Ce n’était pas le cas d’Aleix Espargaro : l’Aprilia RS-GP prise dans la voie des stands était sa deuxième moto, jamais pilotée durant le week-end, et il est parti avec des pneus froids. Il lui a donc fallu plus de temps d’adaptation. D’où son deuxième tour en 1’47.432, quand Jack Miller est en 1’46.123 (1,309 seconde de mieux).
Dans sa remontée, Aleix Espargaro dépasse Takuya Tsunoda, Tetsuta Nagashima, Takaaki Nakagami, Remy Gardner, Alex Rins, Raul Fernandez et enfin Fabio di Giannantonio. Les manoeuvres pour doubler coûtent du temps, comme le fait de suivre des pilotes moins rapides quand dépasser n’est pas possible. Ce qui est souvent le cas à Motegi, circuit dit ‘stop and go’. « Ici c’est très difficile de doubler. J’ai perdu beaucoup de temps derrière Fabio di Giannantonio, qui roulait une seconde moins vite », expliquait-il.
Si on estime que ces éléments ont fait perdre entre 3 et 5 secondes au pilote Aprilia, et que celles-ci sont déduites de son temps de course, cela le fait remonter à la 10ème place, derrière Enea Bastianini et devant Marco Bezzecchi. Tel était son potentiel dans des circonstances. Il reste encore une quinzaine de secondes à aller chercher pour gagner. Et c’est là qu’entre en jeu ce qui n’était pas calculable, mais bien primordial.
Une moto qui « n’avançait pas »
La machine enfourchée par Aleix Espargaro après son passage aux stands n’était pas celle de son choix, et différente de celle qu’il souhait utilisée. Elle n’était premièrement pas entièrement préparée de la même manière, car « pas utilisée de tout le week-end ». « La moto n’avançait pas, elle avait un moteur très vieux », a-t-il aussi ajouté. Et le pneu arrière dur à l’arrière n’était pas celui qu’il avait choisi.
« Ce n’était pas les pneu de course, il ne fonctionnait pas », a expliqué l’Espagnol, qui avait lui prévu de rouler avec le medium. « Le pneu arrière tendre ne m’allait pas bien, j’étais parmi les rares qui roulaient bien avec le pneu medium », testé en FP1 puis au warm-up. C’est également la monte choisie par son coéquipier, Maverick Viñales. Dans le top-10, seuls Marc Marquez (4ème) et Enea Bastianini (9ème) ont fait la course avec le pneu tendre.
Il faut enfin prendre en compte le fait qu’il devait partir sixième. Cela l’aurait placé dans le groupe de tête, ou en tout cas pas loin. D’autant plus essentiel que Motegi est un circuit où les dépassements sont difficiles, ce qui rend les premiers kilomètres très importants. Les cinq pilotes dans le top-5 au premier tour furent aussi ceux du top-5 à l’arrivée. Et derrière, les différences se sont avérées minimes : Luca Marini 6ème alors qu’il était 8ème au premier tour, Maverick Viñales 7ème alors qu’il était 6ème, Fabio Quartararo 8ème alors qu’il était 9ème.
Mais… Jack Miller était très fort
Tous ces éléments donnent du crédit aux propos d’Aleix Espargaro, qui aurait certainement fait mieux que 16ème ou même 10ème au Japon. Mais cela ne veut pas dire qu’il aurait « très tranquillement gagné ». Qu’il aurait été compétitif peut être prouvé, mais dans ce cas-là, on ne peut savoir jusqu’à quel point.
Certes, le vainqueur du Grand Prix d’Argentine 2022 était rapide sur le sec aux essais, avec le 4ème temps en FP1 puis le 8ème au warm-up. Mais il n’a pas non plus été dominant, contrairement à Termas de Río Hondo où il s’était imposé. À l’inverse, Jack Miller a occupé le haut du tableau en FP1 (meilleur temps) puis au warm-up (3ème).
La performance de l’Australien est indubitable. Un ton au-dessus en course, il a signé pas moins de 15 tours en 1’45, ce que personne n’a su faire. Aleix Espargaro avait envoyé quelques 1’45 au warm-up, mais aurait-il tenu l’allure face au pilote Ducati, et la distance à ce rythme avec un pneu medium alors que Jack Miller était en dur ?
Seul au monde, Thriller Miller comptait pas moins de 5,454 secondes d’avance sur le deuxième dans l’avant-dernier tour, avant de relâcher pour franchir le drapeau à damiers 3,4 secondes avant Brad Binder
Et maintenant ?
Aleix Espargaro a quitté Motegi avec 25 points de retard sur Fabio Quartararo, leader du mondial, et 7 sur Francesco Bagnaia, deuxième. « C’est difficile à digérer, mais maintenant plus que jamais, il me faut essayer de gagner une course. C’est la seule option qui me reste. Fabio (Quartararo) a maintenant un Grand Prix d’avance et il en reste quatre. Je dois gagner l’une des prochaines courses, sinon ce sera impossible (d’être champion) », statue-t-il. La suite de l’histoire en Thaïlande, sur le circuit de Buriram, dès ce week-end.
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